mardi 8 septembre 2009

galoper

"Et puis, dans ces vies, j'ai trop couru. Jamais le temps, comme les boutiquiers derrière moi dans le compartiment, qui s'affairent pour la nuit en papotant. Il fallait gagner sa place, travailler, étudier, mériter ses galons. Toujours poussé par des nécessités bouffonnes dans le flot de la foule, sans cesse aller, cavaler, vite, plus vite. La société toute entière accélère encore cette galopade insensée. Dans notre folie de bruit et d'urgence, qui trouve encore le temps de descendre de sa machine pour saluer l'étranger? J'ai faim, dans cette troisième vie, de lenteurs et de silences. De m'arrêter pour un regard bordé de khôl, un mollet de femme qui se dévoile, une plaine brumeuse noyée de songes. Pour manger un bout de pain et de fromage, le cul dans l'herbe, le nez au vent. (...) Assez de voir des civilisations en boîte et de la culture sous serre. Mon musée à moi, ce sont les chemins, les hommes qui les empruntent, les places de village, et une soupe, attablé avec des inconnus."

B.Ollivier, Longue marche

3 commentaires:

  1. Beau texte, oui, qui fait penser à Pierre Sansot "Eloge de la lenteur". Bonne journée !

    RépondreSupprimer
  2. A défaut de prendre le temps... rêver qu'un jour on goûtera le temps... et puis lire ceux qui revendiquent le droit d'aller lentement...doux voyage dans les carnets des autres.

    RépondreSupprimer

votre mot à dire?