samedi 20 mars 2010

la mer écrite

" Oui, c'est cela.
Un éblouissement dans les mots anciens.
L'étagement
De toute notre vie au loin comme une mer
Heureuse, élucidée par une arme d'eau vive.
Nous n'avons plus besoin
D'images déchirantes pour aimer."

Y.Bonnefoy, Pierre écrite, 1965.

"Retrouvons-nous

Si haut que la lumière comme déborde
De la coupe de l'heure et du cri mêlés,
Un ruissellement clair, où rien ne reste
Que l'abondance comme telle, désignée.
Retrouvons-nous, prenons
A poignées notre pure présence nue
Sur le lit du matin et le lit du soir,
Partout où le temps creuse son ornière
Partout où l'eau précieuse s'évapore,
Portons-nous, l'un vers l'autre comme enfin
Chacun toutes les bêtes et les choses,
Tous les chemins déserts, toutes les pierres,
Tous les ruissellements, tous les métaux.

Regarde,
Ici fleurit le rien; et ses corolles,
Ses couleurs d'aube et de crépuscule, ses apports,
De beauté mystérieuse au lieu terrestre
Et son vert sombre aussi, et le vent dans ses branches,
C'est l'or qui est en nous : or sans matière (...)
Or d'avoir consenti, unique flamme
Au flan transfiguré de l'alambic.
(...)

Et nos mains se cherchant
Soient la pierre nue
Et la joie partagée
la brassée d'herbes
Car bien que toi, que moi
Criant ne sommes
Qu'un anneau de feu clair
Qu'un vent disperse
Si bien qu'on ne saura
Tôt dans le ciel
Si même eut lieu ce cri
Qui a fait naître,
Toutefois se trouvant,
Nos mains consentent
D'autres éternités
Au désir encore."
Y.Bonnefoy, Dans le leurre du seuil, "La terre", 1975.




"Quelle maison veux tu dresser pour moi,
Quelle écriture noire quand vient le feu?"

Y Bonnefoy, Une voix, Du mouvement et de l'immobilité de Douve, 1953.

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